
Une voix s’est éteinte. Ce mercredi 27 août 2025, à Paris, le tam-tam du continent a perdu son battement le plus noble. Crépin Ngangha Ditsougou, l’âme sonore d’Africa N°1, le guide aux millions d’auditeurs, a rendu le micro. Pour toujours.
La nouvelle frappe comme un silence assourdissant au milieu d’un bulletin d’information. Elle laisse un vide abyssal dans le paysage médiatique gabonais et africain. Ce n’est pas seulement un journaliste qui nous quitte, c’est une mémoire vive qui s’efface, une chronique ardente de l’Afrique en marche qui se referme.
Né à Lastourville, bercé par les rumeurs de l’Ogooué-Lolo, Crépin Ngangha avait fait du journalisme un sacerdoce. Chaque reportage était une offrande, chaque direct une prière laïque pour la vérité. Formé dans le creuset exigeant de Bordeaux et de Paris, il n’a jamais oublié d’où il venait. Il portait l’Afrique en lui comme un étendard et dans la voix comme un miracle.
Et quelle voix ! Grave, chaude, timbrée, d’une autorité bienveillante. Une voix qui vous prenait par la main au petit matin pour vous guider à travers les soubresauts du continent. Des indépendances aux printemps arabes, des larmes aux espoirs, il était là. Sur le front, dans la boue des chemins, au cœur des fêtes populaires comme dans la tension étouffante des sommets. Grand reporter, il était le témoin qui ne trichait pas, celui qui faisait voir avec les mots et entendre avec l’émotion.
En 2008, il hérite de la lourde tâche de diriger l’antenne d’Africa N°1. Il devient le stratège, le gardien du temple, le père veillant sur l’esprit du « tam-tam » sans jamais renier l’âme du terrain. Il restait ce mentor exigeant, qui soufflait à l’oreille des jeunes recrues : « L’Afrique doit écrire elle-même son histoire. » C’était son combat, sa raison d’être.
Aujourd’hui, le studio provisoire d’Angondjé est un peu plus froid. Les écouteurs semblent résonner d’un absentéisme cruel. La nation auditive qu’il avait bâtie est en deuil.
Crépin Ngangha s’en est allé, emportant avec lui une part de notre jeunesse, de nos révoltes et de nos espoirs captés sur les ondes. Il laisse derrière lui un silence lourd de tous les mots qu’il n’aura plus le temps de dire.
Mais dans ce silence, si l’on tend bien l’oreille, on l’entend encore. Sa conviction, son amour de l’Afrique, son exigence : tout cela continue de vibrer, en nous. Sa voix n’est plus une onde, elle est devenue mémoire. Et cette mémoire, à jamais, sera notre bien le plus précieux.
Reposez en paix, grande voix. Ton écho ne nous quittera jamais.