
Une affaire présumée de torture et de séquestration arbitraire, impliquant des agents de la Direction générale des services spéciaux (DGSS), a été portée sur la place publique ce jeudi par la famille de la victime, Lévi Ayami. Cette révélation intervient presque deux ans jour pour jour après le changement de régime du 30 août 2023, suscitant une inquiétude palpable quant à la persistance de pratiques que beaucoup croyaient révolues.
Lors d’une conférence de presse tenue à Libreville, Aïda Ayami épouse Nyonda, sœur de la victime, a relaté avec une gravité mesurée les événements subis par son frère. Ce dernier, absent pour cause de traumatismes physiques et psychologiques, est présenté comme un citoyen ordinaire vivant au PK8.
Selon le récit familial, Lévi Ayami aurait été arrêté puis soumis à de violents sévices par des agents de la DGSS. Ces derniers l’auraient accusé à tort de complicité dans une affaire de vol de fonds impliquant un gouverneur. « Pas dans un pays en guerre, pas sous une dictature lointaine, mais ici au Gabon, en 2025 », a souligné Mme Nyonda, insistant sur le caractère anachronique de tels actes dans le contexte politique actuel. Les allégations, étayées par un certificat médical, font état de passages à tabac, d’humiliations et de blessures intentionnelles.
L’affaire aurait connu un rebondissement lorsque le gouverneur concerné serait intervenu pour disculper M. Ayami, confirmant que sa compagne, principale suspecte nommée Jessica, n’avait commis aucun vol. La famille dénonce le fait que les agents se soient contentés d’évoquer un « malentendu » pour clore le dossier, sans autre forme de procès.
Des recours juridiques pour rompre l’impunité
Face à ce qu’elle perçoit comme une justice défaillante, la famille Ayami a initié plusieurs procédures. Une plainte officielle a été déposée auprès du tribunal de première instance de Libreville pour « torture, traitements inhumains et dégradants, séquestration arbitraire, abus d’autorité et dénonciation calomnieuse ». La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), ainsi que la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), ont également été saisies.
La famille souligne que cette affaire dépasse le cadre d’un simple dysfonctionnement et pointerait vers une « gangrène » systémique au sein des services de sécurité. Elle réclame une enquête indépendante, la suspension immédiate des agents mis en cause et une réforme en profondeur de la DGSS, un héritage de l’ancien régime dont le mode opératoire semble perdurer.
Le silence assourdissant des autorités
À ce jour, le gouvernement et les institutions concernées ne se sont pas publiquement exprimés sur ces accusations pourtant graves. Ce silence est perçu par les observateurs comme un test crucial pour les nouvelles autorités, dont la légitimité repose en grande partie sur la promesse de rompre avec les abus passés et d’instaurer un État de droit.
L’appel lancé par la famille Ayami à la communauté nationale et internationale vise à garantir que la lumière soit faite et que justice soit rendue, non par vengeance, mais pour affirmer que de telles pratiques n’ont plus leur place dans le Gabon de l’après-2023.