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Cameroun : Le procès Martinez Zogo entre enfin dans le vif du sujet
Près de deux ans après l'assassinat sauvage du journaliste star Martinez Zogo, le procès militaire ouvre enfin les débats sur le fond. Les premiers témoins s'apprêtent à parler, dans une affaire qui implique des espions, un magnat des médias et des généraux.

L’heure de vérité a enfin sonné. Ce lundi, le tribunal militaire de Yaoundé a ouvert la phase la plus cruciale du procès hautement sensible de l’assassinat de Martinez Zogo. Après des mois de manœuvres procédurales et de reports, les débats sur le fond commencent, promettant de plonger au cœur d’une affaire qui ébranle les plus hautes sphères du pouvoir camerounais.
Le 17 janvier 2023, Martinez Zogo, animateur radio adulé et voix incontournable de l’émission « Embouteillages » sur Amplitude FM, était sauvagement enlevé. Cinq jours plus tard, son corps était retrouvé atrocement mutilé à Soa, en banlieue de la capitale. Son crime ? Avoir, selon ses proches, dénoncé avec férocité la corruption des élites.
Fin des jeux de procédure, place aux questions qui fâchent
«C’est le moment que nous attendions tous : nous allons enfin pouvoir poser les vraies questions », lance Me Calvin Job, avocat de la famille de la victime. La question est simple et terrible : qui a assassiné Martinez Zogo, qui a commandité le crime, et pourquoi ? Une quête de vérité entravée par un obstacle de taille : l’accès au dossier d’instruction, que les avocats de la partie civile n’ont toujours pas intégralement reçu.
Espions, magnat et militaires sur le banc des accusés
Dans le box des accusés, un casting qui ressemble à un thriller politique : des officiers supérieurs et plusieurs membres de la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE), les services de renseignement extérieurs camerounais. Ils sont poursuivis pour enlèvement, torture et complicité d’assassinat.
L’homme d’affaires et baron de la presse Jean-Pierre Amougou Belinga, figure centrale de cette enquête aux multiples rebondissements, est également dans le viseur de la justice. Son avocat, Me Charles Tchoungang, affiche un calme olympien : son client verrait même dans l’ouverture de ces débats « le début de sa libération ».
La bataille judiciaire et médiatique est lancée
Pour Me Jacques Mbuny, défendant le colonel Justin Danwe, l’urgence est de « consulter les nombreuses pièces du dossier » au greffe, un casse-tête logistique. Mais comme tous, il est soulagé d’« entrer dans le vif du sujet ».Me Claude Assira, représentant les intérêts de la DGRE, appelle à la solidarité pour « chercher la vérité » et distinguer les « comportements criminels » des simples « confusions ».
Le procès de Martinez Zogo est bien plus qu’une affaire criminelle. C’est un test pour la justice camerounaise, scrutée par une opinion publique qui exige des réponses. Alors que les premiers témoins s’apprêtent à être entendus, une seule certitude persiste, macabre et symbolique : le corps de Martinez Zogo, lui, est toujours sous scellés à la morgue, attendant que la lumière soit faite sur son calvaire.