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La protection de l’enfance au Gabon : entre engagement d’État et action de terrain de la Fondation Ma Bannière
La visite officielle de la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU sur les violences contre les enfants, Dr. Najat Maalla M’jid, a servi de catalyseur pour dresser un état des lieux sans concession de la situation des jeunes Gabonais. Si les initiatives locales se multiplient, les défis restent immenses.

En pleine lumière diplomatique, le Gabon affiche sa volonté de faire de la protection de l’enfance une priorité nationale. La rencontre entre la Représentante Spéciale du Secrétaire Général de l’Onu chargée de la question des violences contre les enfants et les responsables de la Fondation Ma Bannière, portée par la Première Dame Zita Oligui Nguema, n’est pas un simple fait protocolaire. Elle symbolise la jonction entre un engagement international réaffirmé et le travail opérationnel mené au quotidien sur le terrain.

Zita Oligui Nguema lors de son intervention.
« Nous faisons simplement notre part avec humilité », a déclaré Mme Oligui Nguema, résumant la philosophie d’une structure conçue comme un refuge pour les jeunes en détresse.
Cette visite intervient quelques semaines après une annonce majeure : l’adhésion du Gabon à l’Alliance mondiale pour mettre fin à la violence à l’encontre des enfants. « Le Gabon réaffirme son choix d’une société fondée sur la dignité, où l’enfance est un sanctuaire », stipulait le communiqué présidentiel du 1er novembre 2025.

Une vue des panelistes lors de la table ronde sur la
protection de l’enfance au Gabon.
L’école, un théâtre de violences inquiétant
Derrière les déclarations d’intention, la réalité est alarmante. Les violences – physiques, psychologiques, sexuelles – contre les enfants prennent des proportions inquiétantes au Gabon, s’immisçant jusque dans l’enceinte scolaire.
« La solution, c’est déjà de punir ces actes et de sensibiliser les parents », analyse Esther Lydie, une étudiante, qui pointe également la complexité apportée par « le phénomène des familles recomposées ». Une fragilité sociale qui peut exacerber les risques.
Sur le front de la reconstruction


Le service social du centre d’accueil Arc en Ciel
Face à l’urgence, des centres d’accueil tentent de panser les blessures, visibles et invisibles. Au Centre d’Accueil Arc-en-Ciel de la Vallée Sainte-Marie, à Libreville, l’objectif est clair : offrir un abri temporaire et un accompagnement sur mesure pour préparer le retour en famille.
« Le but n’est pas de garder les enfants ici. Nous les remettons à leurs parents après une médiation », explique Léonie Mounguengui Badjinou, assistante sociale. Ces structures accueillent des profils variés : victimes de traite, d’agressions sexuelles, ou nécessitant un suivi post-carcéral.
La prise en charge psychologique est fondamentale. « Quand un enfant arrive, c’est d’abord la mise en confiance. Ensuite, on met en place des thérapies systémiques familiales ou personnalisées », décrit Sévin Bougouendji, psychologue clinicien. Un travail de longue haleine pour aider les victimes à retrouver goût à la vie.
L’appel à l’action systémique de l’ONU

Lors de ses échanges, Dr. Najat Maalla M’jid a salué les efforts gabonais, mais a lancé un avertissement sans ambages. Elle a plaidé pour une approche systémique et responsable, impliquant tous les niveaux de l’administration.
« S’il est vrai que la protection des enfants relève de l’éducation, c’est aussi le rôle de toute l’administration territoriale. Cette approche doit tenir compte de la reddition des comptes, sinon on n’y arrivera jamais », a-t-elle insisté. Un message fort sur la nécessité d’une coordination efficace et d’une obligation de résultats.
Une mobilisation à consolider

La visite aura ainsi permis de mettre en lumière le fossé entre les engagements de haut vol et les réalités du terrain. Le travail des fondations et des centres d’accueil, bien que crucial, ne peut suffire. La voie tracée est celle d’une mobilisation coordonnée : État, société civile, partenaires internationaux et communautés doivent former une chaîne de protection sans faille. Le chemin est encore long, mais les bases d’une réponse plus structurée semblent se dessiner. L’enjeu est de taille : permettre à chaque enfant gabonais de grandir enfin à l’abri de la violence.



