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L’UDB suspend un député rebelle : « Au Gabon, l’hémicycle est un cocon, les réseaux sociaux sont un champ de mines »

Fiacre Mpako Ngoma a osé dire tout haut ce que les ménages pensent tout bas sur la taxe d’habitation. Son parti lui offre un séjour… à l’ombre.

Un député gabonais vient de découvrir à ses dépens la première règle non écrite de la jeune démocratie post-transition : on peut débattre de tout à l’Assemblée, sauf de ce qui fâche vraiment… surtout sur Facebook. La sanction est tombée comme un couperet bien huilé, ravivant le grand classique : qui du parti ou du peuple doit tenir la laisse de l’élu ?

C’est ainsi ou presque : dans la jeune et vibrante démocratie gabonaise, il existe désormais une Zone d’Expression Non Autorisée (ZENA). Son premier résident involontaire ? Fiacre Mpako Ngoma, député UDB, coupable d’avoir utilisé ses doigts pour taper sur un clavier plutôt que pour voter sagement. Son crime ? Avoir suggéré sur les réseaux sociaux que la nouvelle taxe d’habitation, cette merveilleuse idée qui viendra garnir votre facture d’électricité, méritait peut-être un petit « non » collectif.
 
La réaction du parti a été d’une rapidité exemplaire. Moins d’un clic après la publication du post fatal, le Secrétariat général de l’UDB a brandi sa Décision n°00001 (oui, la toute première ! Un collector), suspendant illico le parlementaire turbulent. Motif : « message contraire à la discipline du groupe ». Autrement dit, faire de la politique en public, c’est  vilain. Le document, un bijou de novlangue, rappelle avec une onction quasi-mystique que « le cadre d’expression d’un Député (…) est l’Assemblée Nationale ».  Sinon : « Mon cher, tes électeurs, c’est bien. Mais tes chefs de groupe, c’est mieux. Contente-toi de lever la main dans l’hémicycle, c’est plus sûr. »
 
La sanction, dite « conservatoire », est immédiate. Finies les réunions de section, les tee-shirts floqués UDB et les galettes des rois entre camarades. En attendant le verdict final du Conseil de discipline, M. Ngoma est prié de méditer dans son coin sur les vertus du silence partisan.
 
Le député sort le deuxième couteau
 
Mais visiblement, le député n’a pas reçu le mémo sur la soumission. Loin de filer doux, il a riposté par une lettre incendiaire au président fondateur de l’UDB. Son argumentaire ? Le parti serait en train de se faire gentiment squatter par des « transhumants politiques », ces anciens du PDG qui changent de chemise comme de slogans. « Il est préférable de connaître ses ennemis que de transporter des souris dans un sac d’arachides », philosophe-t-il, annonçant une conférence de presse pour déballer le « nepoti cocooning » et la « désorientation idéologique » qui guetteraient l’UDB. On attend le pop-corn.
 
La taxe qui fait tousser (sauf au gouvernement)
 
Au cœur de cette tempête dans un verre de thé fiscal : une taxe forfaitaire d’habitation, qui doit naître en 2026 dans le doux cocon de votre facture SEEG. Présentée par le pouvoir comme le Saint-Graal de la relance économique, elle est vue par une partie de la population comme le dernier clou dans le cercueil du pouvoir d’achat. L’UDB, en bon parti présidentiel, défend la ligne officielle avec une discipline de fer. Un peu trop, peut-être ?
 
En envoyant Fiacre Mpako Ngoma au frigo, l’UDB pose une question existentielle : un député est-il l’élu du peuple ou le soldat d’un parti ? Pour l’instant, la réponse semble pencher pour l’option militaire. Mais l’histoire ne fait que commencer. Le Conseil de discipline va devoir trancher : réintégrer le trublion et risquer la contagion de la libre-pensée, ou l’évincer et offrir au pays un martyr fiscal bien pratique.
 
Une chose est sûre : la taxe d’habitation aura au moins réussi à faire la lumière sur une autre taxe, celle que prélève la discipline partisane sur la liberté de parole. Et ça, c’est un impôt que les Gabonais connaissent déjà bien.

 

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