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France- Matignon : Un gouvernement éphémère entre dans le livre des records
En l'espace d'une nuit, la France a vécu un épisode de haute farce politique : la démission de Sébastien Lecornu, seulement quelques heures après avoir dévoilé une équipe gouvernementale déjà moribonde. Une pantomime institutionnelle qui plonge le pays un peu plus profondément dans la crise.

L’Élysée, habitué aux communiqués solennels, a cette fois-ci rivalisé de laconisme. Quatorze heures. C’est le temps qui a suffi pour que le palais présidentiel annonce, dimanche soir, la naissance d’un gouvernement et, lundi matin, son décès prématuré. Le premier communiqué détaillait la composition de l’équipe de Sébastien Lecornu. Le second, dans un style aussi dépouillé qu’une pierre tombale, a acté sa démission, « acceptée » par Emmanuel Macron.
La Ve République, qui avait déjà vu des gouvernements tomber et des coalitions s’effriter, n’avait encore jamais assisté à un naufrage aussi rapide. Un record de précipitation qui s’ajoute à un premier exploit : les 26 jours de gestation nécessaires à M. Lecornu pour accoucher de cette équipe, un délai jamais vu pour former un exécutif.
La raison de cette lenteur ? Une quête ambitieuse du « compromis » et du « quoi avant le qui », selon la novlangue matignonesque. Une noble intention, en apparence, qui a surtout consisté à étirer des négociations jusqu’à ce que la corde casse.
La reconduction, cette « rupture »
Quand le voile a enfin été levé, dimanche soir, le pays a découvert la fameuse « rupture » promise. Une rupture si profonde qu’elle a pris la forme d’une… continuité. Sur les 18 ministres, 12 étaient déjà en poste sous le gouvernement précédent. Seuls deux nouveaux visages sont venus égayer cette photographie de famille où les mêmes sourires se figent.
Mais la véritable étincelle qui allait embraser la poudrière n’était pas un nouveau venu. C’était un revenant : Bruno Le Maire. L’ancien ministre de l’Économie, que beaucoup d’opposants tiennent pour l’architecte des dérives budgétaires du quinquennat, faisait son retour, promu au ministère des Armées. Un choix perçu comme une provocation, un affront à la fois pour l’opposition et pour les alliés de circonstance.
L’implosion en temps réel
La réaction n’a pas tardé. Du côté des Républicains (LR), alliés indispensables et déjà froissés, la pilule est passée d’autant moins bien qu’ils n’ont obtenu que quatre portefeuilles. Bruno Retailleau, pourtant reconduit à l’Intérieur, a lui-même déploré que « la composition du gouvernement ne reflète pas la rupture promise ». Le parti a convoqué une réunion d’urgence, sonnant le glas de l’alliance.
Devant ce front du refus qui s’élargissait – la gauche, l’extrême droite et maintenant la droite –, et face à la menace d’une motion de censure imminente, M. Lecornu n’a eu d’autre choix que de rendre les armes. Son gouvernement, qui n’aura même pas eu le temps de prendre ses marques, entre déjà dans l’histoire comme le plus éphémère de la République.
Le pays dans l’impasse, le Président au pied du mur
Le voilà donc, le fruit de trois semaines de marchandages : un gouvernement démissionnaire, chargé de gérer les affaires courantes en attendant l’inconnu. La balle est désormais dans le camp d’Emmanuel Macron. Au Président de choisir son prochain coup : nommer un nouveau Premier ministre, tentant l’improbable une seconde fois, ou dissoudre l’Assemblée nationale, jouant sa dernière carte et celle de la nation sur un nouveau scrutin.
En attendant, la France, déjà engluée dans le marasme économique, peut contempler le spectacle de sa classe politique, capable de battre des records de lenteur pour mieux organiser une course vers le précipice.